Editions Les Escales- 2017- 442 pages
Ce livre, c'est d'abord l'histoire d'une rencontre, celle d'une auteure avec son éditrice, entre lesquelles des liens se créent pour devenir bien plus qu'une collaboration professionnelle.
Depuis que je participe à cette belle aventure dédiée aux premiers romans, je me suis rendue compte (comme l'a souvent dit Charlotte à l'origine de cette superbe initiative), au fil de mes découvertes, qu'il y a dans un premier roman un je ne sais quoi de spécial, très souvent j'ai ressenti comme un don de soi de la part de l'auteur, une émotion particulière...comme pour une première fois. Et je m'aperçois que ce qui me touche, souvent, c'est la démarche, l'intention de l'auteur.
Ici, le contexte est particulier. On apprend dès les premières lignes qu'Evelyne Pisier est décédée au cours de l'élaboration de ce roman. Caroline Laurent, son éditrice et également amie, s'attache à poursuivre la rédaction de ce livre, pour faire aboutir un projet qui a mûri à deux. L'idée du livre est de relater la vie d'Evelyne Pisier à travers celle de sa mère, Mona dans le roman, qui s'est émancipée au fil des années et a développé des valeurs féministes qu'elle a transmises à sa fille, Lucie dans le roman. De leur vie à Saïgon, puis en Nouvelle-Calédonie, et enfin en métropole, c'est l'histoire d'un cheminement, d'une affirmation de soi, de sa liberté.
Le parti pris de retranscrire la vie de sa mère, et à travers elle sa propre vie, sous le prisme du roman en fait toute son originalité. Et pourtant, l'autofiction ne me plaît pas du tout en tant que démarche littéraire. Et contre toute attente, ici j'ai totalement adhéré. Cela tient je pense au fait que la raison de ce choix est clairement expliqué et assumé.
Alors on traverse les lieux et les époques, de l'Indochine aux DOM-TOM, mais aussi Cuba, du milieu des années quarante aux années deux mille, c'est passionnant (avec un bémol sur la période cubaine qui m'a plus ennuyée même si les événements s'y révèlent extraordinaires).
Les chapitres sont courts et régulièrement enrichis par des chapitres intermédiaires où Caroline Laurent rend compte des émotions qui la traversent à l'écriture de ce récit, dont elle est maintenant seule dépositaire, sa recherche de coller au plus juste de ce qu'aurait voulu dire et transmettre Evelyne, comme un hommage. Caroline Laurent explique aussi comment la vie d'Evelyne résonne en elle, en écho à sa propre histoire. J'ai vraiment aimé ces réflexions.
Ma note: