Editions Albin Michel - 2020- 392 pages
Le Gour Noir, c'est une vallée isolée, perdue dans les montagnes, où vit la famille Volny. Le père, Martin, revenu éprouvé de la Deuxième Guerre mondiale; la mère, Martha, qui s'est complètement réfugiée dans la religion; le grand-père maternel, Elie, qui s'est retrouvé handicapé des suites d'un accident; et enfin les quatre enfants, Matthieu, Marc, Mabel (l'unique fille, officiellement prénommée Jean) et Luc, alors adolescents ou jeunes adultes.
Tous sont liés à la centrale électrique qui surplombe la vallée. Ils y travaillent, de père en fils. La ville et la centrale appartiennent à un certain Joyce qui règne en maitre autoritaire sur son territoire. Pourtant, un vent de liberté se met à souffler, le désir d'émancipation, à commencer par Mabel, la fille de la famille Volny. Et si ce vent nouveau signait la fin d'un ordre établi?
Cette centrale électrique se trouve au coeur du paysage, véritable araignée qui a tissé sa toile, telle qu'elle est décrite dans le livre. L'atmosphère est dure et froide dans ces montagnes où on perçoit une immuabilité, une absence de perspectives. On travaille à la centrale, ou au barrage qui l'alimente ou encore à la carrière attenante, les hommes se retrouvent à l'Amiral, le bar de la ville, qui propose aussi des femmes à l'étage. Le tout tenu d'une main de fer par le propriétaire tout puissant, qui habite un immeuble entier à lui tout seul. Il s'est octroyé une garde rapprochée, une milice chargée de surveiller les habitants.
Je découvre Franck Bouysse avec ce livre, dont je trouve déjà le titre magnifique. Buveurs de vent symbolise ce désir de liberté, d'émancipation porté par certains protagonistes, mais aussi cette ode à la nature: les montagnes, les forêts, la rivière occupent une place prépondérante dans le récit. Et la famille Volny s'intègre parfaitement dans ce décor: ce sont des taiseux, on ne se dit pas les choses, laissant les non-dits et les rancoeurs s'installer. Seuls les quatre enfants entretiennent des liens très forts entre eux, animés d'un amour fraternel profond.
Cette micro société coupée du monde semble parfois irréelle, aux accents dystopiques parfois. Entre les prénoms bibliques donnés aux enfants Volny, les prénoms des parents quasi identiques, et enfin ceux du cercle de Joyce (Snake, Lynch...), l'auteur brouille les pistes en mélangeant les influences.
L'ambiance y est très noire mais l'espoir trouve sa place. L'écriture est très belle, lyrique (un peu trop, parfois?), les chapitres sont courts, j'aurais aimé toutefois que les personnages soient plus fouillés, ce qui m'aurait probablement permis de rentrer encore plus dans l'histoire.
Mais cela reste un très bon livre, qui recueille de très bonnes critiques.
L'avis de Krol
Ma note: