Editions Gallmeister - 2019 pour l'édition originale - 2021 pour la traduction française - 288 pages
A Serra de Conti, en Italie centrale, près d’Ancone, la boulangerie du village est tenue par les Ceresa, depuis plusieurs générations. Luigi, le père, est un rustre, peu apprécié, dur avec ses enfants et indifférent avec sa femme Violante, laquelle tente de survivre alors qu’elle met au monde des enfants qui meurent pour la plupart. Parmi ceux qui vivent, Antonio sera pourtant tué accidentellement par un paysan. Puis Nella, à peine sortie de l’adolescence, est envoyée au couvent sur la colline, conséquence d’une situation embarrassante; Adélaide, qui tombe rapidement gravement malade; Lupo, jeune garçon sauvage et rebelle et enfin Nicola, Nini, chétif, peureux, qui aime se réfugier dans les livres. Point de tendresse ou d’empathie des parents envers leurs enfants dans cette famille. Giuseppe, le grand-père paternel, est le seul adulte de la famille à vouloir faire bouger les choses: acquis aux idées révolutionnaires, il tente de les transmettre à Nella et Lupo en particulier, et ne manque jamais une occasion et rappeler à son fils Luigi n’est pas solidaire avec le peuple et lui fait honte, d’autant que la boulangerie se trouve largement sur le déclin.
La solidarité, la protection, la tendresse s’exercent entre frères et sœurs, avec ceux qui restent, à savoir Lupo et Nicola. Le plus grand s’est donné pour mission de protéger son petit frère, de le préserver des dangers que Nicola ne saurait affronter.
Voici un roman absolument magnifique, même si l’histoire est parfois âpre. On suit le lien fraternel qui unit Lupo et Nicola, deux êtres que tout oppose. Lupo, accompagné de Chien, un jeune loup trouvé qu’il apprivoise et domestique, est un jeune garçon au fort tempérament. On suit ces mouvements socialistes, anarchistes et révolutionnaires qui veulent renverser le roi et qui se développent en Italie à l’aube de la Première Guerre mondiale, dont certains membres déçus viendront grossir les rangs du nationalisme et du fascisme, à commencer par Mussolini lui-même. Lupo, alors métayer , s’engage dans ces mouvements, pour défendre les droits des exploités. C’est l’époque aussi où l’Eglise perd du terrain, au sens propre comme au sens figuré puisque qu’elle est expropriée d’un certain nombre de terres. Aussi, lorsque Lupo apprend que Luigi veut envoyer Nicola au séminaire, pour se débarrasser de ce fils qu’il juge inutile, il rentre dans une colère folle.
Les personnages sont très intéressants, le récit accorde une place particulière à ce couvent qui surplombe le village, et spécialement à sœur Clara, une Soudanaise enlevée, qui tient d’une main de fer la congrégation. La relation entre les deux frères, et leur évolution, notamment au gré des événements de l’Histoire, se révèle très profonde. J’ai appris beaucoup de choses sur la situation de l’Italie à cette époque du début du XXeme siècle, politique, sociale, religieuse. La jeune auteure a puisé dans son histoire familiale pour livrer ce récit.
L’écriture est d’une grande maîtrise et vraiment belle. On est vraiment pris dans l’histoire, et certaines scènes sont d’une grande intensité.
Une très belle découverte.
Ma toute première participation au Mois italien organisé par Martine
Ma note: