Éditions Viviane Hamy - 2016- 367 pages
Deux jours avant Noël, un groupe d'une dizaine de SDF occupe la cathédrale Notre-Dame de Paris. Emmenés par le jeune Mouss, ils réclament le droit à un logement et se présentent comme porte-parole de tous les mal logés. Le père Kern, prêtre de la cathédrale, et Gérard, le sacristain, sont pris en otage.
A l'extérieur, les soutiens et les détracteurs se regroupent sur le parvis, ainsi que les forces de police.
Mû par son sacerdoce et sa charité chrétienne, le père François Kern sert d'intermédiaire entre l'extérieur et les révoltés, sans prendre clairement position pour eux. L'intervention de la Police après deux jours d'occupation libére Notre-Dame de ses occupants. Lors de l'assaut, Mouss est blessé et transporté à l'hôpital.
Un an plus tard, Mouss est retrouvé mort dans la Seine. Il a été tué. Claire Kauffmann, juge d'instruction, va à la rencontre du père Kern qui officie désormais dans un centre qui consigne les biens des démunis, pétri de culpabilité depuis l'intervention policière.
Si l'action ne s'était pas déroulée d nos jours, on aurait pu aisément imaginer qu'elle se droulâr au Moyen-Age. En effet, comment ne pas penser d'emblée au roman de Victor Hugo à la lecture de ce livre?
Une bande de miséreux, une vraie cour des miracles, dont on suit la condition et le mode de vie. Ce groupe d'invisibles, individus avec chacun leur parcours, leur histoire, que l'auteur nous livre mais sans trop en dire non plus. Car ce milieu est celui de la déchéance, de ce qu'on fut et qu'on ne sera plus. Alors, envahir Notre-Dame, à Noël c'est un ultime coup d'éclat que Mouss et ses compagnons d'infortune s'autorisent.
A leurs côtés, physiquement parlant, le père Kern-et son sacristain dans un personnage plus secondaire, quoique...- voit lors de cet événement l'occasion de réfléchir sur sa foi, les raisons de son engagement dans la prêtrise. L'évolution de ce personnage, sa complexité, constituent un point très fort de cette histoire.
Et au-dessus de lui, la hiérarchie cléricale gravite, scandalisée par cette invasion de sous-hommes qui ébranle une tranquilité de façade que ces hommes d'église entendent maintenir pour conserver la mainmise. Le clergé médiéval et de l'Ancien Régime n'est pas si loin...
Et enfin, la cathédrale elle-même, d'où part toute l'intrigue. Majuestueuse, imposante, l'auteur lui donne une véritable place et un vrai rôle dans toute cette histoire.
Alexis Ragougneau a réussi à transposer une intrigue traditionnelle à l'époque moderne. Il met en scène des personnages très travaillés, déroule un récit parfaitement maîtrisé. L'écriture est absolument remarquable, avec une mention spéciale pour les dialogues. La confrontation entre un abbé, personnage issu d'un autre temps, et la juge d'instruction lors d'un interrogatoire vaut le détour par sa justesse et son intensité.
Ce livre met en lumière tous ces jeux de pouvoirs, en particulier au sein du "clergé", mais aussi la place qu'occupent les marginaux dans notre société.
Il plaira aux amateurs de roman noir, à ceux qui lisent aussi des polars même ce n'en est pas vraiment un.
Un grand merci à Valérie qui m'a donné envie de lire ce livre.
Un coup de coeur.