Éditions Actes Sud - 2016 - 140 pages
Alger, 1956. Fernand Iveton, ouvrier, soutient le peuple algérien dans son combat pour la liberté à disposer de lui-même. Il s'engage auprès d'un petit groupe clandestin et pose une bombe dans l'usine où il travaille, à l'écart des ateliers. Car l'objectif n'est pas de faire des victimes mais de marquer les esprits. La bombe est decouverte avant qu'elle n'explose et Fernand est arrêté. Emprisonné, assisté d'un avocat, l'un comme l'autre sont plutôt confiants sur la suite donnée à cette affaire, dans la mesure où il n'y a pas eu de victimes. Mais c'est sans compter sur les tensions politiques et de l'opinion publique autour du conflit algérien...
Ce petit livre (140 pages) entend faire œuvre de mémoire autour de la figure de Fernand Iveton, jeune Français de trente ans, vivant en Algérie, où il était arrivé avec ses parents alors qu'il était encore enfant. L'Algerie, c'est sa terre, et il apporte son soutien à ceux dont il considère légitime qu'ils aspirent aux mêmes droits et à la même liberté que les Français de métropole. Fernand n'est pas un politique, il croit en ses idéaux, a foi en la liberté, l'égalité et la justice. Et le but de l'action de poser une bombe est bien de marquer les esprits, éveiller les consciences et surtout ne pas faire de victimes. Il appartient à un petit groupe d'idéalistes comme lui, quatre ou cinq personnes tout au plus.
D'abord serein, il réalise au fur et à mesure de sa détention que les choses risquent de ne pas tourner en sa faveur. Il est dépeint comme un terroriste pour l'opinion publique, et les "événements d'Algérie " tendent chaque jour de plus en plus la classe politique française. Il faut donc envoyer un message fort pour dissuader cette rébellion. Fernand Iveton le paiera de sa vie. Incontestablement, il aura fait figure d'exemple - l'épilogue du livre va en ce sens. Cette justice, à laquelle il croyait tant, ne lui aura pas rendu la pareille. Le livre raconte les méthodes policières, la torture.
D'un autre côté, cet état de fait suscite la réflexion. Que Fernand Iveton ait servi d'exemple, dans un contexte bien particulier, c'est indiscutable. Seulement, où place-t-on la limite dans le jugement d'une personne qui pose une bombe, pour la considérer ou non comme terroriste? La réponse n'est pas simple. Ce livre traite d'un fait historique, sur lequel nous avons aujourd'hui un peu de recul, mais la question se pose tous les jours. En tous cas, cela mérite réflexion, et c'est tout l’intérêt pour moi de ce genre de livres. Je serais curieuse de savoir pourquoi l'auteur a choisi ce thème et cette figure pour son premier roman
De plus, l'écriture est très belle, je ne saurais donc que trop vous conseiller la lecture de ce livre.
Il a obtenu le Prix Goncourt du premier roman -ce qui a fait scandale car il ne figurait pas dans la liste finale- mais son auteur l'a refusé.
Ma note: