Editions Robert Laffont - 2017- 185 pages
Albert Barraud fut médecin dans un hôpital de Bordeaux au cours de la Seconde Guerre mondiale. Grand résistant, il est arrêté par les Allemands en avril 1944, puis déporté au camp de Neuegamme. Il n'en reviendra jamais, laissant derrière lui une veuve et deux garçons, dont le père de l'auteure, le cadet, alors âgé de huit ans.
L'ombre de ce grand-père héroïque, dont une rue à Bordeaux porte le nom, a toujours plané sur la famille, mais personne n'en parle vraiment. Et Marie le ressent particulièrement auprès de son père qui ne semble pas considérer son père comme le héros que tout le monde dépeint.
Parvenue à l'âge adulte, Marie part à la recherche de l'histoire de ce grand-père, ouvrant la voie à celle de sa famille et de sa propre vie...
Quel beau livre! J'ai été très émue par cette relation entre le père et la fille, ce père que Marie adule et qui l'impressionne tant. C'est finalement elle qui va panser les plaies de ce père qui parait aussi fort qu'un roc. Cette relation est portée par l'amour, l'admiration et la bienveillance, réciproques.
L'auteure raconte l'histoire de son grand-père au fur et à mesure de ce qu'elle apprend au cours de ses recherches. Cette histoire, tragiquement banale pour l'époque (j'espère ne pas choquer en disant cela), n'est pas tellement le propos du récit, mais davantage ce que la disparation de cet homme, ce mari, ce père, a eu comme conséquences sur les siens. La difficulté pour les enfants de vivre sans père à leurs côtés, avec le sentiment pour le père de Marie d'avoir été abandonné par son propre père, qui aura "préféré" rester auprès de ses malades plutôt que de sauver sa peau. Et la colère que cela a entrainé chez cet homme au cours de sa vie.
L'auteure met au jour le rapport que nous entretenons avec notre histoire familiale, et la nécessité de la connaitre pour se construire soi-même, quel que soit le type de passé duquel on hérite. Le livre nous parle ainsi de la difficulté de se parler au sein d'une famille, à la suite d'événements tragiques souvent, où les choix ne sont pas toujours expliqués, compris par les uns et les autres, chacun restant avec sa tristesse, sa colère...
Enfin, la dernière partie relate comment Marie, accompagnée de son frère, entreprend le voyage sur les lieux de la déportation et de la mort de leur grand-père. Elle retranscrit avec une infinie émotion les sentiments qui les ont animés, et comment ce voyage aura bouclé la boucle et réconcilié son père avec son grand-père, plus de soixante-ans après.
Ce livre est tout simplement magnifique. Il m'a saisie, émue, j'étais en larmes en refermant le livre. J'ai dû repre,dre mon souffle entre les pages. Marie Barraud livre un témoignage d'amour très touchant, un cri même, pourtant très pudique et délicat, à ses proches, à ce père qu'elle aime tant. Une sincérité bouleversante.
Merci les 68premièresfois.